La critique d'une des idéologies du démocratisme est toujours ambiguë, car se plaçant nécessairement sur le terrain du capitalisme, donc sur une option réformiste, même si elle prend une forme radicale. En cela, tout discours est inutile, superflu. Au final, seul le mouvement historique comptera, et il se passera de nous et de nos discours, puisque nous serons morts. Ces textes ne seront plus qu'un témoignage de nos gesticulations pour comprendre par quel processus notre humanité nous échappe, et c'est très bien comme ça.
Décembre 2016
Religionisme/athéisme
«Impie n’est pas celui qui fait place nette des dieux du vulgaire, mais celui qui préte aux dieux les idées du vulgaire"
Epicure
"On est prié d'apporter son âme"
Louis Jouvet
"La religion est le soupir de la créature accablée, le cœur d'un monde sans cœur, comme elle est l'esprit des temps privés d'esprit. Elle est l'opium du peuple."
Karl Marx
"Dieu est, l'homme est esclave. L'homme est libre, dieu n'est plus. Je défie quiconque de sortir de ce cercle, et maintenant, choisissons."
Bakounine
La critique interne des religions a été mille fois faite.
Considérant que:
-les pires sornettes sont considérées comme des dogmes
-les différents livres saints disent à peu près tout et son contraire
-les voies de Dieu sont impénétrables
-le mystère est l’essence même de la foi
-le croyant a choisi ses œillères, et qu’il n’est pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir
Il est pratiquement impossible d’introduire le doute chez un croyant.
On peut cependant considérer que le passage du polythéisme au monothéisme était une condition non pas nécessaire mais optimale pour accompagner l’accumulation primitive du capital.
Le monothéisme, en prônant l’unicité d’un dieu exogène, affirme la séparation de l’homme et de son univers, de son destin, de lui même. Quelque soit cette divinité, qu’elle soit bienveillante et miséricordieuse, ou jalouse et vengeresse, elle exige soumission et adoration, préparant le terrain du démocratisme consumériste voué à l’adoration marchande.
Le monothéisme, en séparant le sacré du profane, proclame la fin de la plénitude humaine, exige la schizophrénie sociale comme norme et mode de reconnaissance mutuel. En consacrant l’existence d’un clergé, triste négociant entre le divin et l'humain, le monothéisme parachève la séparation de l’homme et du divin.
Le monothéisme, en promouvant le salut individuel, extirpe l'homme de son devenir social et le prépare à la confrontation avec son ennemi moderne : la marchandise. La marchandise ne peut s'envisager que comme possession solitaire, jouissance individuelle et égocentrée. Cette confrontation, l'individu ne peut qu'en sortir perdant, et doit s'en extraire par le retour au collectif actif, sous peine de mort.
Toute la période du féodalisme et de l’ancien régime a été marquée par un effort de soudure idéologique et religieuse. La révolution de 1789, les deux dernières guerres mondiales, le régime soviétique, mai 68 ont marqué des déclins du religionisme, Le monde marchand grignotant petit à petit chaque espace de nos vies pour finalement les remplir intégralement, les religions ont reculé quantitativement (5% des français se disent pratiquants) et qualitativement par un phénomène d’auto-dissolution (Vatican II). Le démocratisme n’a que faire de ces reliquats d’idéologie religieuse qu’il ne tolère que dans la mesure où ce sont des reliquats. La nouvelle doctrine doit tout submerger et ne tolérera pas de concurrence. C’est pourquoi l’Islam, en tant que représentant virulent d’un capital arriéré, sera d’une manière ou d’une autre évincé.
Le monothéisme, en instaurant le manichéisme, division de l’humanité entre Dieu et Diable (mystère de la sainte dualité), entre bons et méchants, saints du paradis et mécréants de l’enfer, est source d’intolérance et de conflits. Il justifie les guerres, cautionne la barbarie (axe du mal, forces du bien, ceux qui ne sont pas pour nous sont contre nous etc). Si l’existence d’un dieu assez cruel pour accepter, voire encourager les pires massacres, les pires calamités, était avérée, ce serait une catastrophe pour l’humanité aveugle et sourde à son destin."
"Quant à mes ennemis, qui n'ont pas voulu que je règne sur eux, amenez-les ici et égorgez les devant moi." Luc 19 : 27
Le monothéisme, en tant que représentant aléatoire du progrès de l’idéologie marchande, est une négation de notre humanité, une promotion marchande de l’humain, les pas balbutiants de la substitution de la «communauté de l’être par la société de l’avoir» (Francis Cousin)
Le démocratisme, en s’affirmant laïque et moderne, envoie balader ces vieux supports d’un autre âge. La nécessité religieuse n’est plus, la marchandise s’émancipe de tout artifice pour régner en maître absolu. L’homme, pensant s’affranchir de ses vieux démons, accompagne et promeut le spectacle de sa marchandisation, ingère son aliénation à la marchandise. Il n’y a plus d’espace entre lui et la marchandise, il est marchandise et sera traité comme tel.
La marchandise est la nouvelle religion, le nouvel opium du peuple. Elle possède ses divinités (les marchandises), ses temples ( les hypermarchés) , son clergé (les partis politiques), ses fidèles (les salariés/chômeurs).
En abandonnant le religionisme pour mieux plonger l'humain dans l'adoration marchande, le démocratisme triomphe en présentant une fois de plus l'aliénation suprême (moderne) comme une libération nécessaire, tel un serpent opérant sa mue.
Le monothéisme marchand nous subjugue par sa diversité spectaculaire, son uniformité essentielle.
L’athéisme, stade suprême du monothéisme, semble être l’ultime évolution de l’idéologie démocratique, pour qu’enfin l’homme puisse sacrifier sans frein à la divine marchandise. L’athéisme, en libérant l’homme du carcan religieux, le précipite un peu plus dans l’univers marchand, le fétichisme de la marchandise. En rejetant tous les gourous, tous les tabous, l'homme est enfin libre de s'adonner au seul culte moderne, celui de la marchandise.
Il va sans dire que les écrits ici exposés, en tant que modeste contribution à l’expression d’une perception de la réalité du moment, peuvent être copiés, cités, déformés, utilisés. Ils sont mis à la disposition de ceux qui y trouvent un intérêt, ni plus ni moins. En cela, ils n'ont aucune valeur marchande et n'appartiennent qu'à ceux qui en prennent possession. Ils ne se conçoivent que dans l'anonymat, non parce que l'auteur ne les assume pas, mais parce ce travail ne peut être compris que comme une évidence.